Nous voyons fleurir ces derniers temps enquêtes et articles tout azimut, les uns pour vanter les mérites cachés du recrutement sur les réseaux sociaux, les autres pour nous dire à quel point les jobboards restent la pratique préférées des recruteurs. Or, ces deux types de plateformes sont tellement différents que nous voyons difficilement comment il pourrait y avoir débat sur la question. Explications.
Les jobboards sont nés aux Etats-Unis au milieu des années 90 et sont arrivés timidement en France au début des années 2000. Soutenus par certains consultants qui y voyaient une révolution du recrutement, critiqués par d’autres qui ne juraient que par la presse écrite, ils finissent par supplanter cette dernière et sont aujourd’hui quasi-incontournables pour qui veut recruter. Les réseaux sociaux et plus particulièrement les réseaux sociaux professionnels sont un peu plus récents : 2003 pour LinkedIn et 2004 pour Viadéo. Généralistes, ils sont d’abord l’apanage des early adopters de la communication et du marketing avant que d’autres catégories socio-professionnelles s’en emparent. Leur usage est plus diversifié que les jobboards.
La tentation de l’opposition, une fausse bonne idée
Evidemment, il est tentant de vouloir opposer ces deux pratiques. L’une est plus ancienne, l’autre s’inscrit dans un phénomène beaucoup plus récent qui est celui des réseaux sociaux. Nous sommes donc confrontés à une opposition valeur sûre / gadget à la mode qui fait les choux gras des grands débats dans la même veine que Génération Y / Génération X dans l’entreprise. A croire que nous aimons particulièrement opposer les générations dans une période où plus que jamais il est nécessaire de faire le pont entre elles dans l’entreprise. Par ailleurs, si les jobboards s’inscrivent dans le but, quasi-unique, de recruter des potentiels pour l’entreprise, les réseaux sociaux professionnels ont une vocation bien plus large. De ce fait, est-il bien sérieux de s’acharner à comparer les deux ?
Deux outils à la démarche différente
Du dépôt de son profil dans une CVthèque à l’ouverture d’un compte LinkedIn ou Viadéo, n’y aurait-il qu’un pas ?
Nous sommes très tentés de vous répondre non. Le candidat ou le potentiel candidat à une offre n’est pas sur ces deux supports pour les mêmes raisons, même si la présence sur un réseau social professionnel peut être aussi envisagée comme un appel du pied au recruteur. En effet, nous vous le répétons depuis des lustres : les réseaux sociaux ne sont pas des jobboards ! (et vice-versa). Alors pourquoi s’acharner à comparer les pratiques ?
Du côté des recruteurs, l’usage est bien évidemment plus ciblé : effectivement, le recruteur présent sur un réseau social est souvent là pour y faire son sourcing, tant qu’à faire ! Mais le sourcing sur un réseau social et le passage en revue au peigne fin d’une CVthèque répond-t-il aux même mécanismes ? En effet, le profil sur un réseau social offre bien plus qu’un CV : un compte animé, avec une veille par exemple, en dit bien plus long. De même que les interactions du candidat, ses interventions sur des groupes, ses contacts, sont bien plus parlants. Passez-vous le même temps sur un CV et sur un profil online ? Le profil sur le réseau social permet également d’afficher directement ses publications, son portfolio, des collaborations, etc.
En revanche, le candidat sur le réseau social est moins dans une logique de recherche d’emploi que celui dans une CVthèque comme le souligne Jean-Baptiste Veron du Figaro Classified :
« Un CV déposé sur Cadremploi, RegionsJob, l’Apec, ou autre est quand même le signe d’un souhait de mobilité, d’une attente de contact, voire d’une disponibilité immédiate pour une proportion plus importante de candidats. »
Outre ces aspects « techniques », prendre contact avec quelqu’un sur un réseau social professionnel ne signifie pas forcément lui proposer un poste : le recruteur peut donc avoir une logique de vivier, de réseautage (comme le nom l’indique, d’ailleurs). Ces possibilités sont beaucoup plus limitées sur un jobboard où l’interaction recruteur-candidat se fait à l’occasion d’une offre d’emploi la plupart du temps. Là encore, Jean-Baptiste Veron met en garde les candidats qui en attendraient trop du seul usage des réseaux sociaux dans le cadre de leur recherche d’emploi :
« Tout se passe comme si Viadéo et LinkedIn avaient laissé croire aux candidats qu’ils allaient être chassés pour des postes fabuleux. Or, la réalité est toute autre, le recruteur a besoin de diffuser rapidement son offre sur des médias éprouvés, pour ne pas perdre de temps et rendre disponible son offre sur le marché. Sur ce niveau les réseaux sociaux se sont « job boardisés » mais avec (à date) une audience qui n’apparaît pas assez significative pour remplacer les sites de diffusion d’offres d’emploi. »
Deux outils qui innovent régulièrement
Les jobboards ne disparaitront pas demain : ils continuent, comme les réseaux sociaux, d’innover. D’abord en se spécialisant en fonction des domaines professionnels (créatifs, professions du numérique, bancassurance, etc) et des situations des candidats potentiels (senior, jeunes, etc). La nécessité de se différencier sur un marché très concurrentiel les amène à réfléchir à des concepts toujours plus innovants. Par exemple, MonkeyTie vous propose de tester votre affinité avec les entreprises, Jobaroundme valorise la proximité domicile-lieu de travail, …Bien sûr, l’appli mobile reste de mise, pour que les candidats puissent consulter les offres d’emploi en toutes circonstances, de même pour les réseaux sociaux afin de valoriser les interactions.
Volet jobboard sur les réseaux sociaux professionnels, comme sur LinkedIn ou Viadéo ou encore blog adossé à un jobboard, les deux outils s’ouvrent autant aux besoins des entreprises en recrutement qu’à ceux des candidats en interactions avec les entreprises. Inutile donc de rêver à une domination du jobboard sur le réseau social ou inversement : les deux outils ne sont pas près de se laisser distancer l’un par l’autre sur le marché du recrutement en ligne. Et pourquoi s’en plaindre ?
Deux outils complémentaires
En effet, loin de multiplier les entrées inutilement, ces deux outils sont tout à fait complémentaires. Si nous ne pouvons plus les opposer par rapport à l’absence ou non d’interactions avec des candidats potentiels comme nous venons de le voir, ils n’en restent pas moins deux vecteurs de recrutement différents. L’un permettant par exemple de subvenir à des besoins en recrutement temporaires et l’autre à entretenir des relations sur du plus long terme avec une sphère de candidats potentiels.
Mais leur complémentarité est aussi envisageable sous d’autres angles : nous pouvons imaginer un recrutement multicanal en fonction des cibles recherchées. En effet, si les réseaux sociaux touchent aujourd’hui toutes les catégories de métier, nous observons que la représentation n’est pas égalitaire partout. Les réseaux sociaux restent également des terrains privilégiés pour la chasse de profils ou encore, pour la prise de références et la vérification d’informations comme le souligne Jean-Baptiste Veron :
« Les réseaux sociaux semblent en fait être utiles pour les prise de références, mais pas tellement pour rentrer en contact sur le marché des cadres (cf. Etude Sourcing de l’APEC = 2 % des recrutements cadres effectués en externe). Ceci hors chasse. »
Reste aux recruteurs à imaginer les applications à mettre en œuvre pour profiter de manière optimale de la complémentarité de ces deux outils au regard des besoins spécifique à leur entreprise. Enfin, le réseau social reste idéal pour communiquer sur sa marque employeur et attirer de potentiels candidats.
Mais alors, que veulent dire ces enquêtes ?
En filigrane, ces enquêtes nous amènent surtout à faire deux constats :
- L’utilisation des réseaux sociaux n’est pas optimale ni du côté des candidats, ni du côté des recruteurs ;
- L’usage des réseaux sociaux dans le cadre du recrutement est exponentiel, même s’il reste mineur aujourd’hui
- Ni les réseaux sociaux, ni les jobboards ne vont disparaitre des pratiques de recrutement dans les années à venir.
Pas vraiment de raison de les opposer donc, mais plutôt une vraie nécessité d’optimiser les pratiques !
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