Arsenal législatif, signature de chartes, actions de sensibilisation en entreprises… plusieurs initiatives tentent de lutter contre le sexisme au travail. Quels sont les résultats sur le terrain ? La rédaction de Talentéo vous dit tout !
« Ils ont recruté une super commerciale, elle est très jolie ! ». « J’ai tenté de promouvoir des femmes au maximum, bien que nos dossiers soient très techniques ». « Vous êtes si sensibles, vous, les femmes… Vous prenez tout à cœur ». « Miss, j’aimerais avoir ta vision féminine sur ce dossier ». Voici quelques-unes des remarques sexistes dont certaines femmes peuvent être l’objet au cours de leur carrière. C’est une des multiples facettes de ce qu’on appelle le sexisme ordinaire. Celui-ci peut également s’exprimer au travers d’une attitude ou d’une décision en ce qui concerne l’évolution professionnelle.
Un sujet toujours d’actualité
Toutes les études menées sur cette question arrivent à la même conclusion : ce fléau a la dent dure. Selon le dernier Baromètre biennal du collectif #StOpE, 8 femmes sur 10 estiment que les attitudes sexistes sont régulières au travail. Cette initiative, portée par l’AFMD, l’Association française des managers de la diversité, rassemble 270 organisations signataires qui s’engagent à lutter contre le sexisme en entreprise. Autre baromètre, même constat, celui du Haut Conseil à l’Égalité, cette fois.
Celui-ci, daté de janvier 2024 fait état de 46 % de femmes qui se disent victimes d’un acte sexisme au travail. 77 % des Français estiment que les femmes ne sont pas traitées de la même manière que les hommes au travail. En allant plus encore dans le détail, les résultats restent assez alarmants. Le baromètre du collectif #StOpE souligne que 3/4 des femmes sont exposées par le biais de blagues. Il constate que la maternité est encore considérée comme un « problème » pour l’entreprise et un « handicap » pour la carrière des femmes. Sur ce point, près de 7 femmes sur 10 font état de ce type de propos en 2021. Enfin, 50 % des femmes jugent avoir déjà rencontré des obstacles au cours de leur carrière en raison de leur sexe. En effet, cela peut être des augmentations ou primes non reçues jusqu’à des promotions non accordées.
Des conséquences sur le bien-être au travail
Tout cela n’est évidemment pas sans conséquence. « Pour beaucoup, le sexisme, c’est de l’humour, ce n’est pas grave. En fait non, ce n’est pas anodin. C’est une question de respect dans l’environnement de travail. Ç’a de vraies répercussions sur le ressenti, le bien-être, la motivation et la carrière d’une femme ». C’est ce qu’explique Anne-Laure THOMAS, directrice Diversité et Inclusions chez l’Oréal et co-fondatrice de l’initiative #StOpE. « Plus de neuf femmes sur dix ont ressenti l’impact délétère du sexisme. C’est-à-dire qu’elles ont l’impression que cela a écorné leur confiance en elle et en leurs compétences ». Voici ce que commente Brigitte GRESY, présidente du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes de 2019 à 2022.
De timides avancées
Malgré tout, en regardant dans le rétroviseur, on peut déceler un léger mieux. Selon l’étude #StOpE, 60 % des femmes ont déjà entendu des propos dégradants basés sur des stéréotypes féminins. Certes, il reste encore des efforts à fournir, mais c’est 8 points de moins qu’en 2021. Autre aspect positif : de plus en plus de salariés des 270 entreprises signataires de#StOpE se forment et se disent plus vigilants face aux comportements sexistes. Une prise de conscience sans doute permise grâce à différentes actions en entreprises. Elle peut naître d’une campagne d’information rappelant les contacts référents comme la RH ou le CSE. Mais aussi grâce à la mise en place de temps d’échanges, à l’instar du groupe Volvo. La référente employeur HSAS (harcèlement sexuel agissements sexistes) propose à ses équipes des sessions de dialogue. Et l’État a évidemment un rôle à jouer à travers les lois.
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Les effets de la loi prennent du temps à se faire ressentir
En 2015, un article est ajouté à la loi relative au dialogue social pour définir le sexisme, comme étant » tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant « . Quatre ans auparavant, la loi dite « Copé-Zimmermann » avait imposé un quota minimal de 40% de femmes dans les conseils d’administration et de surveillance. Dix ans plus tard, d’après la Délégation aux droits des femmes, cela a permis de faire voler en éclat l’inertie en matière de parité économique qui prévalait dans les instances de gouvernance. Déception chez d’autres qui ont estimé que cela n’avait eu aucunes conséquences sur les PME, et sur les sociétés non cotées. Ils déploraient également la faible représentation des femmes à des postes à responsabilités.
La loi « Rixain »
La loi « Rixain« , promulguée le 24 décembre 2021, exige une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes parmi les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes des entreprises comptant au moins 1 000 salariés, ainsi qu’une obligation de transparence à cet égard. Pour assurer cette transparence, la déclaration des écarts de représentations F/H dans les postes de direction a été mise en place.
Elle doit être remplie au plus tard au 1er mars de chaque année. S’ajoute à cela la déclaration, pour les entreprises de plus de 50 salariés, de leur index mesurant l’égalité salariale au sein de leur structure qui s’appuie sur 100 points. Les résultats doivent être communiqués à l’inspection du travail ainsi qu’au comité social et économique (CSE), et publiés sur le site Internet de l’entreprise. La note moyenne des entreprises de plus de 1 000 salariés a augmenté d’environ 7 points entre 2019 (82,9) et 2023 (89,7), mais seulement 2% des entreprises ont une note de 100. 77 entreprises ont à date une note inférieure à 75 points depuis 2020.
Même constat mitigé selon l’étude 2024 menée par l’Observatoire Skema de la féminisation des entreprises. Le quota de 30% de femmes au Comex (Comité exécutif) prévu par la loi « Rixain » pour 2026 a été atteint pour 12 de ces entreprises (contre 8 en 2021) : BNP Paribas, Carrefour, Crédit Agricole, Dassault Systèmes, Kering, Legrand, L’Oréal, Michelin, Pernod-Ricard, Saint-Gobain, Schneider Electric et Société Générale.
Une nette progression reste à faire
À noter aussi que les femmes n’occupent que 6,25% des 80 postes de Président et/ou Directeur Général des entreprises du CAC40 (3,75% en 2022 et 2,5% en 2021). D’ici 2029, le quota passera à 40% avec un délai de deux ans pour se mettre en conformité, sous peine de pénalité financière. Le rapport du HCE souligne de maigres progrès et pointe le « manque de confiance envers les institutions et des politiques pour prévenir et lutter contre les actes et violences sexistes« . Il indique que les pouvoirs publics ne sont pas jugés « à la hauteur des enjeux » sur ces questions, notamment par les instances judiciaires, « 80 % estiment que l’arsenal juridique existant est mal appliqué, voire insuffisant« .
Malgré les efforts déployés, il reste encore beaucoup à faire pour atteindre la parité et éliminer le sexisme dans les organisations. Suivez-nous sur nos plateformes sociales pour être au courant des dernières actualités.
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