Si l’autisme impacte les relations interpersonnelles, influence les émotions et développe une hypersensibilité sensorielle des personnes qui en sont atteintes, leurs qualités particulières et même exceptionnelles sont trop souvent négligées.
@talentEgal a rencontré Flora Thiébaut, psychoclinicienne, experte de l’autisme et créatrice d’Auticonsult. Son concept original valorise les personnes autistes, réelles valeurs ajoutées pour le monde du travail.
Après votre formation en France, vous avez fait un Master de recherche sur l’autisme à l’Institut of Cognitive Neuroscience de Londres. Vous avez ensuite « bifurqué » dans votre démarche : dîtes nous en plus !
L’idée m’est venue de ne plus tester les personnes autistes, mais de les aider ! Je voyais trop de personnes rejetées, exclues, qui n’étaient pas intégrées dans la société. Leur estime de soi était mise à mal.
Malgré leurs compétences, elles étaient dépendantes de leurs parents, ou encore des minimas sociaux. Discriminées, elles étaient toutes seules chez elle à ne rien faire de leurs neurones !
Vous recrutez des consultants autistes. Comment se passe la collaboration avec vos clients ?
Nos consultants autistes sont accompagnés dans chaque mission. 1 coach encadre 8 consultants qui travaillent soit en interne, soit chez le client. Lors de missions externes, le client et son équipe sont formés à l’accueil du consultant, pour une meilleure compréhension de l’autisme. Le déroulé de cette formation est ensuite mis par écrit afin que tout soit clair. Le même coach suit le consultant tout au long du projet.
En interne, on emploie un tech-lead (chef de projet tech) pour 12 consultants. S’il apparaît un décalage au niveau technique, le tech-lead peut ainsi rassurer le client.
À votre avis, des personnes qui ne seraient pas autistes pourraient-elles faire le même travail que vos consultants, avec la même perception des projets, le même résultat ?
Aussi bien oui, mais différemment. Les personnes autistes ne sont pas meilleures que les neurotypiques, mais elles ont une analyse divergente : « out of the box ».
Un exemple ?
Un de nos clients travaillait sur la robustesse d’un système d’anonymisation. Le client avait donné 2 mois pour le craquer. Notre consultant, hacker éthique, vulcanologue de formation passionné de cybersécurité, autodidacte, a cassé le code en 1 mois en partant d’un algorithme génétique. L’ingénieur du client n’y avait pas pensé …
La spécialité d’Auticonsult est l’informatique. Dans quels autres domaines les personnes autistes seraient-elles une véritable valeur ajoutée ?
En informatique, les capacités des personnes autistes sont très compatibles avec le développement, les data, l’analyse de données, la cybersécurité, les tests logiciels (assurance qualité). Pour des projets plus basiques, leurs conscienciosité est appréciée pour la G.E.D (gestion électronique de documents).
Nous développons la partie finance et bientôt la comptabilité.
Quelles actions mettez-vous en place pour l’intégration des personnes autistes au sein des entreprises ?
La première action, c’est d’être certain que nos clients acceptent la différence. Pour cela, toute l’équipe avec laquelle travaille le consultant est sensibilisée sur l’autisme. La sensibilisation est découpée en deux parties : une généraliste et une axée sur notre consultant. En effet, chaque personne étant différente, nous mettons à point d’honneur à impliquer notre collaborateur dans la construction de cette sensibilisation. D’ailleurs il peut, ou non, intervenir lors de celle-ci.
Durant ce moment d’échange, nous en profitons pour transmettre à toute l’équipe de travail les coordonnées du coach qui accompagne notre consultant. Celui-ci se tient à la disposition des collaborateurs de l’entreprise accueillante pour répondre à l’ensemble de leurs questions.
Enfin, dernière action, mais non des moindres, un membre de l’équipe de travail est identifié comme référent. Cela se fait sur la base du volontariat et permet à notre consultant et à son coach d’avoir un interlocuteur privilégié pour toute question ou toute problématique pouvant se poser durant la mission.
Que diriez-vous pour inciter des employeurs à s’intéresser à des candidatures de personnes autistes ?
Si les sociétés sont déjà convaincues que la diversité est un vecteur d’efficacité, d’innovation, alors elles seront satisfaites ! Cette analyse de la perception des choses est un vrai plus par le côté « out of the box ». Dans ce cas je leur dis : « Appelez-nous ! ».
Et si elles ne sont pas, je leur dirais que 70 % des personnes autistes ont un QI normal ou supérieur à 130. Leur pensée est hyper logique, concrète avec un grand sens du détail. Elles sont persévérantes, consciencieuse et très franches… ce qui peut certes avoir un impact dans le cadre professionnel.
Les difficultés d’adaptation sociale des personnes autistes ne devraient pas pénaliser leurs compétences extrêmes. En fait, c’est nous qui sommes « des handicapés de la communication » !
L’intégration des personnes autistes portée par Auticonsult devrait même commencer dès le début des études. L’entreprise est d’ailleurs partie prenante du projet Université Friendly. 13 universités y participent afin de les rendre plus accueillantes aux personnes autistes.
Des engagements dans lesquels se retrouve @talentEgal, qui agit au quotidien pour permettre l’accès à tous aux études supérieures. Découvrez-en plus sur leurs missions !
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