Talentéo, en partenariat avec En Route Pour Rio, est allé à la rencontre de Perle Bouge, multi-médaillée mondiale et paralympique en Double – 2 rameurs avec 2 rames chacun – mixte avec Stéphane Tardieu dans la catégorie « bras ». Elle revient avec nous son parcours et ses objectifs de fin de carrière, avec, toujours en ligne de mire, Rio 2016 !
Perle Bouge aux jeux Paralympiques de Londres en 2012
Bonjour Perle, Comment vient-on à l’aviron handisport ?
J’ai eu un accident de la route, et j’ai décidé très vite de me rediriger vers le sport. Je me suis d’abord tournée vers le basket fauteuil et j’ai intégré l’équipe de France pour laquelle j’ai joué 10 ans. Nous ne nous sommes pas qualifiés pour les Jeux de Pékin. C’est dans le cadre de mon travail à Bayonne que j’ai découvert l’aviron. On m’avait demandé de voir l’accessibilité des pontons.
J’ai découvert ce sport qui avait l’air sympa et j’ai été prise dans l’engrenage. Après 2 ans de réflexion, j’ai quitté le basket et me suis tournée vers l’aviron où la préparation était plus individuelle. Dés le début, mon but était vraiment de me qualifier pour des jeux et d’y obtenir des médailles.
Tu rames en double mixte avec Stéphane Tardieu, comment vous êtes vous rencontrés ?
En France, pour l’aviron, on rame toute la saison en solo – skiff -. Dans ma catégorie, à l’occasion des championnats de France, on met la meilleure rameuse et le meilleur rameur ensemble. En ce qui concerne Stéphane, il avait déjà eu d’autres partenaires avant moi. J’ai battu sa précédente coéquipière et on a donc été appairé.
Est-ce-que les premiers résultats ont été rapides à venir ? Et comment peux-tu l’expliquer ?
J’ai eu des échos des entraîneurs qui m’ont dit que mon passé de basketteuse de haut niveau m’offrait de bonnes aptitudes physiques. Après, il a fallu travailler le côté technique.
Je suis une sportive et un compétitrice dans l’âme donc je savais qu’il fallait beaucoup s’entraîner. Avec Stéphane, après les championnats de France, on nous a fait ramer très rapidement ensemble. Nous avons participé à une première compétition en coupe du monde en Slovénie où nous avons décroché une médaille de bronze alors que notre technique était largement perfectible. Par contre, on se rend compte aujourd’hui que les résultats sont de plus en plus difficiles à obtenir. Il nous faut redoubler d’efforts à l’entraînement pour rester dans le coup.
Quelle est la médaille qui a été la plus importante pour toi ?
Forcément celle des Jeux ! Pour tout sportif, participer à des Jeux est fantastique, gagner une médaille encore plus. Ma première médaille en coupe du monde a aussi beaucoup d’importance. Elle m’a permis de voir qu’avec de l’entraînement je pouvais avoir des résultats. Je sortais d’une expérience avec le basket où nous ne nous étions pas qualifiées, et cette médaille m’a donné du baume au cœur.
Quelles sont les grandes dates en France cette saison ?
Il y aura les championnats du monde d’Aiguebelette qui seront qualificatifs pour les Jeux Paralympiques de Rio. On peut qualifier « la coque » (ndlr : le bateau) si on finit dans les 8 premiers. Il y aura en suite une régate de rattrapage en 2016, avec 2 bateaux repêchés, et 2 embarcations qualifiées par la FISA (Fédération Internationale des Sociétés d’Aviron). En ce qui nous concerne, il n’y aura que 12 bateaux à Rio dans notre catégorie, c’est le nombre maximum autorisé.
Vous disputez ces championnats du monde en même temps que les valides ?
En aviron, nous faisons tous les championnats du monde en même temps que les valides, sur le même site, c’est enrichissant pour tout le monde.
Même si il est très tôt pour en parler, penses-tu la qualification possible ? Une finale ? Une médaille ?
Je n’ai pas l’habitude de faire des pronostics, on ne sait jamais ce qu’il peut se passer dans une année. Ceci étant dit, avec Stéphane, Nous allons tout faire pour qualifier le bateau. Nous devrions nous qualifier, sinon cela voudrait dire que nous avons beaucoup régressé, ou que les autres ont plus progressé que nous.
J’espère une médaille bien évidemment, mais après 4 ans médaillés d’argent – mondiaux et paralympiques – , nous souhaitons la plus belle. Est-ce qu’on y arrivera ? Je ne sais pas mais on fera tout pour. Attention malgré tout, la loi du sport fait qu’on peut être très bon avant et très bon après, si nous ne sommes pas prêt à l’instant T il sera impossible de gagner.
L’année 2015 sera un peu particulière puisque pré-paralympique. Avez-vous un programme spécifique pour arriver prêt à Rio ?
Nous suivons le programme d’entraînement fourni par les entraîneurs nationaux. J’imagine qu’il est très bien adapté à nos objectifs. Nous continuons aussi le travail de fond « physique » et « technique ». Petit à petit, nous allons accélérer la cadence des stages pour pouvoir ramer plus souvent ensemble avec Stéphane. On pourrait croire qu’il est facile de ramer ensemble, mais à ce stade l’aviron est un sport collectif, et il faut qu’il y ait une dynamique d’équipe pour que le bateau avance vite.
Quel est ton emploi a côté de l’aviron ?
Je suis cadre technique et sportif auprès du ministère des Sports. Je suis mise à disposition de la fédération française handisport, et plus précisément pour l’Aquitaine en tant que cadre technique régional.
Aujourd’hui, il y a une convention de signée pour que je puisse être détachée pour me préparer à hauteur de 48 % pour ma pratique sportive. Concrètement, cela veut dire que je travaille à temps plein en dehors des stages et des compétitions.
Quel est ton rythme d’entraînement ?
7 jours sur 7 du lundi au dimanche avec des séances d’environ 2h à 2H30 en fonction du cycle que l’on suit. En période de stage, tout est doublé.
Quel est votre prochain stage ?
Nous venons d’en un terminer à Bourges, le prochain sera à Bayonne mi-janvier et concernera spécifiquement notre bateau. Nous retournerons ensuite à Bourges en février après les championnats de France Indoor. Nous essayons un maximum de faire des stages supplémentaires. Les conditions de ce championnat de France à l’ergomètre sont les mêmes que pour les valides à l’exception des distances. Nous ramons sur 1000 mètres contre 2000 chez les valides. Il aura lieu au Stade Pierre de Coubertin.
Comment faites-vous pour financer tous ces stages ?
Nous avons la chance d’avoir la Fédération Française d’Aviron qui prend en charge tous les stages nationaux – frais de déplacement, d’hébergement et restauration – ainsi que la participation aux compétitions internationales. Pour les stages supplémentaires, soit les clubs participent soit nous participons.
De mon côté, je suis soutenue par des partenaires privés qui croient en notre projet et nous soutiennent pour l’achat de matériel, pour l’organisation de stages, pour faciliter nos déplacements. Tout cela pour nous mettre dans les meilleures conditions pour préparer les Jeux.
Vous êtes aujourd’hui les fers de lance de l’aviron handisport français. Pensez-vous qu’il y ait derrière vous un potentiel pour reprendre le flambeau ?
On en parle régulièrement entre nous. Nous essayons de tout faire pour donner envie aux personnes en situation de handicap de pratiquer un sport. Je ne suis pas sûre de pouvoir dire aujourd’hui que quelqu’un pourra reprendre derrière nous, il n’y a pas vraiment de relève. Dans la catégorie du 4 + – quatre barré – où l’on rame avec les jambes, j’ai plus d’espoir.
On travaille à l’heure actuelle à court terme, pas à long terme et c’est peut-être une erreur. Monter un bateau comme le notre prend du temps, et il faut amorcer sa construction dès maintenant.
Connaissez-vous le bassin des Jeux ?
De ce que j’ai pu voir, la seule chose que l’on sait, c’est qu’il est en centre ville. A priori à Rio, nous serons exceptionnellement dans le village olympique, ce qui n’était pas le cas à Londres par exemple.
Nous remercions Perle pour sa disponibilité et sa franchise, nous lui souhaitons le meilleur pour 2015 et 2016 !
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Crédit Photographique : AFP Ian Kington
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